La conférence écosocialiste pour la justice climatique 2020, co-organisée par solidaritéS, le Mouvement pour le socialisme (Suisse) et Aufbruch für eine ökosozialistische Alternative (Autriche) notamment, s’est tenue en ligne du 26 au 28 juin. Nous en publions ici la déclaration finale.

La pandémie du Covid-19 a révélé la fragilité de l’économie mondiale néolibérale. Nous devrons ainsi faire face à une nouvelle vague d’austérité et de chômage, alors que les gouvernements défendant les intérêts des entreprises augmentent les impôts et réduisent les dépenses de l’État, comme ils l’ont fait après le krach financier de 2008. 

Tout ceci se déroule dans le contexte de l’effondrement imminent des éco-systèmes mondiaux causé par une surproduction impitoyable, un agrobusiness vorace et l’exploitation délibérée d’hydrocarbures bon marché et polluants pour le profit des entreprises. 

Nous devons remettre en question ce mode de production capitaliste, fondé sur la croissance et la consommation.

Les mesures contre la crise climatique doivent tenir compte du fait que les femmes, les personnes non blanches et la classe ouvrière en général sont touchées de manière disproportionnée par les crises combinées de la pandémie, de l’économie et de la destruction de nos écosystèmes.

Produisons moins, partageons mieux, décidons ensemble !

Si nous ne nous mobilisons pas maintenant, dans ces dix prochaines années, le réchauffement climatique deviendra irréversible, ce qui entraînera une détérioration rapide de la santé et du niveau de vie de la plupart des habitant·e·s de la planète. C’est pourquoi nous avons besoin d’un mouvement de masse à l’échelle mondiale, pour obliger les gouvernements à empêcher une augmentation de la température moyenne à la surface de la planète au-delà de 1,5 °C d’ici 2030. 

Face aux intérêts économiques particuliers qui cherchent à empêcher la réalisation de cet objectif, nous devons construire un mouvement populaire suffisamment puissant pour changer le système.

Nos revendications immédiates

Un tel mouvement international implique des objectifs précis. Nos revendications immédiates incluent notamment :  

  • Le contrôle démocratique et l’appropriation publique de toutes les industries destructrices (comme l’industrie des combustibles fossiles), ainsi que leur conversion immédiate à des sources d’énergie renouvelables. Les travailleurs·euses de ces secteurs devront pouvoir exercer leurs compétences et leur créativité pour la production de services et produits utiles et durables. Les industries de l’armement doivent être démantelées et converties en productions purement civiles et pacifiques. Enfin, un programme de reconversion doit garantir le plein emploi avec une réduction et un partage égal du temps de travail.
  • L’arrêt immédiat de toutes les subventions d’État aux industries aériennes et automobiles, et l’introduction de taxes punitives sur les émissions de carbone et les pollueurs. Nous nous battons pour une socialisation des compagnies aériennes et de l’industrie automobile, leur démantèlement drastique, leur conversion et enfin leur intégration dans un système de transport public abordable et durable. En outre, il est urgent de mettre en place des systèmes de transport urbain gratuits.
  • Un plan d’urgence international coordonné au niveau des États, des villes et des villages, pour une transition globale vers une économie neutre en carbone et équilibrée sur le plan écologique. Ce plan doit être élaboré via l’auto-organisation et la mobilisation de masse des travailleurs·euses, des paysan·ne·s, des femmes et des peuples indigènes. Il doit notamment inclure la conversion de l’agro-industrie et de l’élevage intensif en un système de production alimentaire écologique et durable.
  • Une transformation écosocialiste doit inclure la socialisation du travail de soin aux proches, et sa répartition équitable au sein de la société. Des emplois écologiquement durables doivent être créés dans les domaines de la santé et des soins gratuits et universels, du logement, de l’éducation et des services socialement utiles. 
  • L’annulation immédiate de toutes les dettes, en particulier celles des pays du Sud global et de la périphérie. Les banques internationales et le commerce financier doivent être taxés pour financer un programme de conversion écologique dans le Sud global, en réparation de l’esclavage, du colonialisme et de la destruction écologique causés par l’industrialisation occidentale. La mondialisation économico–financière doit être remplacée par des relations économiques sociales et environnementales entre le Nord et le Sud. Dans cette perspective, notre écosocialisme est solidaire des mouvements populaires du Sud mondial qui luttent contre le néolibéralisme et qui affirment une souveraineté populaire et démocratique.
  • La socialisation de l’industrie bancaire et financière, et son remplacement par un service bancaire public, géré démocratiquement pour l’investissement dans des plans d’urgence de projets écologiquement durables et socialement justes.

Les mots et les bonnes intentions ne suffisent plus. Le capitalisme est littéralement en train de tuer la planète. Un changement de système au niveau continental et mondial est nécessaire. Nous avons besoin d’une alternative radicale, anticapitaliste, écologique, féministe, internationaliste et antiraciste qui place les gens et la planète avant les profits privés. L’écosocialisme offre une alternative au système capitaliste et un avenir pour lequel il vaut la peine de se battre.

Une action commune et décisive : les prochaines étapes

La mobilisation massive des populations est nécessaire pour arrêter la crise climatique. C’est pourquoi il est nécessaire de construire un mouvement international contre la destruction de l’environnement par le capitalisme. 

Nous pensons que le mouvement international pour la justice climatique devrait s’accorder sur des campagnes de masse communes dans un avenir immédiat, dans le but de réduire massivement les émissions de gaz à effet de serre. À cette fin, nous nous attèlerons à promouvoir un dialogue entre le mouvement pour la justice climatique, les syndicats et les mouvements sociaux progressistes. En effet, la protection du climat, la protection de la santé des personnes et les intérêts des travailleurs pour des emplois décents et significatifs doivent pouvoir trouver une expression commune.

Nous soutenons donc la mobilisation pour des manifestations de masse à Glasgow et ailleurs en lien avec la COP 26 de novembre 2021. Nous soutenons également les initiatives pour une journée mondiale d’action et de mobilisation pour la justice climatique à l’automne 2020.

Nous affirmons que le mouvement pour la justice climatique, les organisations progressistes et les syndicats doivent discuter du lancement de vastes campagnes internationales : 

  • Pour la réduction massive de l’élevage intensif et de l’industrie de transformation de la viande, en défendant par contraste le développement de l’agriculture biologique et de l’industrie alimentaire durable.
  • Pour la socialisation des transports, en particulier de toutes les compagnies aériennes et de l’industrie aéronautique et automobile, et pour leur conversion dans la production de systèmes de transport public gratuits/à bas prix et des produits socialement utiles, qui soient durables sur le plan environnemental.

Enfin, nous convenons de nous retrouver physiquement en 2021, pour poursuivre le travail de cette conférence écosocialiste pour la justice climatique et développer notre programme d’action et notre alternative écosocialiste.

Stoppons la hausse à 1,5 °C !

Faisons passer les gens et la planète avant les profits !

Luttons pour une alternative écosocialiste !

Une conférence digitale riche en débats

Initialement, la conférence devait avoir lieu à Bâle et visait à aboutir à un manifeste écosocialiste. La crise sanitaire a évidemment modifié le cours des évènements, et nous a poussé·e·s à organiser cet événement en ligne. Cela a permis à des camarades d’Amérique latine, mais aussi du Royaume-Uni, d’Irlande ou encore des États-Unis d’y prendre part.

Une centaine de participant·e·s ont ainsi pu discuter en ligne d’enjeux essentiels à la construction d’un mouvement écosocialiste, tels que la reconversion industrielle, les liens avec les mouvements populaires du Sud global, l’agriculture et les transports, la répartition du travail de care, ou encore les systèmes de santé publique. Ces différents ateliers visaient à élaborer des revendications pouvant être portées au sein des mouvements sociaux. 

Compte tenu de la difficulté de débattre collectivement des différentes revendications et de leur articulation, nous avons renoncé pour l’instant à élaborer un manifeste complet. Les revendications sont néanmoins publiées sur notre site internet. Les discussions ne font donc que commencer, rejoignez-nous pour l’organisation d’une conférence physique en 2021 !

Publié sur le site de solidaritéS

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