Ceci est le texte du tract que la Gauche anticapitaliste distribuera à l’occasion de la manifestation nationale contre le racisme ce samedi 24 mars : 

En 2012, l’Eurobaromètre (confirmé par l’enquête « Noir Jaunes Blues » de 2017) déclarait les Belges parmi les plus racistes d’Europe. Pourtant, il y a très peu de condamnations du racisme en Belgique (que ce soit au niveau politique, médiatique ou judiciaire). Pourquoi ?

  • Parce que le monde politique ne mise que sur des campagnes médiatiques, rarement évaluées sur leur efficacité ?
  • Parce que les lois anti-discrimination, comme l’évalue Unia, manquent d’effectivité dans les faits ?
  • Parce que la justice (sous-financée et débordée) ne condamne pas assez les rares cas de racisme ou de discriminations qui lui sont soumis ?

Un peu pour toutes ces raisons sans doute… mais surtout parce que :

Le racisme est sous-estimé, minimalisé voire excusé

Plus de 50% des personnes issues de l’immigration disent avoir été victime de discriminations lors d’une recherche d’un logement. Le chiffre monte à 75% lors de la recherche d’un emploi. Ce racisme provoque une surreprésentation des migrant.e.s (et de leurs enfants) dans les chiffres du chômage/CPAS, dans les régimes spéciaux (travail intérimaire, occasionnel ou saisonnier), dans les boulots où les conditions de travail et la rémunération sont les plus mauvaises. Dans certains quartiers à Bruxelles, plus de 50% des jeunes et/ou des femmes issu.e.s de l’immigration sont au chômage. Alors qu’une famille sur deux vit sous le seuil de pauvreté, c’est le cas pour un enfant d’origine étrangère sur trois.

Le racisme va de pair avec une société en crise économique, sociale et culturelle

Toutes les études démontrent depuis 100 ans que le racisme augmente durant les crises économiques et diminue durant les périodes plus fastes. Le partage équitable et la redistribution des ressources dans la société sont les mesures les plus efficaces pour atténuer les préjugés, les discriminations et les conflits entre les différents groupes sociaux. Or cela va à l’encontre du capitalisme.

Notre loi contre le racisme ne le définit pas : le racisme, c’est quoi ?

La définition belge ne parle que de discours de haine (ou d’incitation à la haine) dans la sphère publique (et pas privée ou intra-familiale), alors que le racisme:

  • est une construction sociale et idéologique pour légitimer une domination basée sur une hiérarchisation et un classement des humains sur la base de caractéristiques biologiques, génétiques, culturelles ou religieuses, présumées ou réelles, en races ;
  • est la réduction de l’individu à son stigmate (quiconque est – entre autres choses – Noir.e, Arabe, musulman.e ou jui.f.ve, devient « un.e Noir.e », « un.e Arabe », « un.e musulman.e », « un jui.f.ve », et chacun de ses faits et gestes trouve son explication dans cette identité unique) ;
  • est l’essentialisation et l’amalgame, autrement dit l’écrasement de toutes les différences d’époque et de lieu, de classe sociale ou de personnalité qui peuvent exister entre porteurs d’un même stigmate (« les Noir.e.s », « les Arabes », « les musulman.e.s » ou « les jui.f.ve.s » sont « tou.te.s les mêmes ») ;
  • est la légitimation d’une inégalité de traitement par la moindre dignité des racisé.e.s (qui « méritent » d’être exclu.e.s ou violenté.e.s en tant qu’inaptes ou dangereux.ses) et l’assignation à une place dans la division du travail de certaines catégories de population sur la base de leur origine et de leur couleur de peau.

Voici pourquoi la Gauche anticapitaliste s’implique dans la mobilisation sociale et solidaire avec les dernier.e.s arrivant.e.s mais aussi les descendants de l’immigration, en faisant converger les luttes intersectionnelles (race, genre et classe), dans une dynamique de lutte politique anticapitaliste pour :

  1. Dénoncer les causes des déplacements massifs de populations, en lançant des mobilisations et initiatives politiques de rue contre tous les impérialismes et faiseurs de guerre. Pour la solidarité internationale & humanitaire de peuple à peuple !
  2. Participer à toutes les mobilisations de solidarité et de construction d’alternatives politiques de combat contre les politiques d’immigration restrictives, pour la liberté de circulation et d’installation. Contre l’Europe forteresse, il faut ouvrir les frontières !
  3. Exiger la fin de tous les instruments de chasse aux migrant.e.s, en particulier les systèmes tels que l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtières (ex-Frontex), Sis, Crate, Rabit, Fast Track, Iconet, Vis, Eurodac et Eurosur ;
  4. Intégrer de manière transversale la lutte contre toutes les formes de racismes et de fascismes dans toutes les actions politiques. La Belgique doit ratifier la Convention des Nations Unies, datant de 1990, sur la protection des droits des travailleuses/eurs migrant.e.s et des membres de leur famille. Pour une application plus effective des trois lois genre, racisme et discrimination, ainsi qu’une meilleure (et plus large) définition du racisme et plus de condamnation, y compris des discours politiques ou ministériels ;
  5. Lutter pour le droit de vote des étranger.e.s à toutes les élections, pour l’acquisition de la nationalité par une simple procédure administrative gratuite à partir de 5 ans d’installation, contre les violences policières et les contrôles au faciès (profilage ethnique), contre l’obligation et l’interdiction du port du foulard à l’école secondaire et supérieure, ainsi que dans les entreprises publiques et privées ;
  6. Décoloniser l’espace public, interdire les pères fouettards, blacks-face et autres noirauds, contextualiser Tintin au Congo, etc. : « décoloniser » la production des savoirs et des connaissances, en particulier par les études post-coloniales et décoloniales, la réflexion sur l’histoire de l’esclavagisme, de la traite et de la colonisation, ainsi que sur les déclinaisons sémantiques des racismes (romanophobie, négrophobie, islamophobie, antisémitisme,…)
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