Les actions massives des lycéen.ne.s pour le climat me rappellent des choses. C’était en 1973. Paul Vanden Boeynants était ministre de la Défense nationale. En février, VBD (comme on l’appelait) rendait public ses plans pour la réforme du service militaire obligatoire. Le délai accordé pour pouvoir faire des études supérieures avant le service militaire serait aboli. Conséquence : tous les lycéens masculins (les filles en étaient exemptes) allaient devoir renter pour un an dans l’armée, sans aucun délai. Après le secondaire, on ne pourrait donc pas commencer ses études, ce qui allait mettre un frein considérable aux possibilités d’études pour beaucoup de jeunes.

En réaction à cette réforme, les lycéen.ne.s sortaient massivement dans la rue jusque dans les plus petites villes. À l’époque, j’étais jeune enseignante à Furnes (Flandre occidentale). Là aussi, ça bougeait ! Les lycéen.ne.s de l’Athénée Royal sortaient et se dirigeaient vers les écoles catholiques (collège et institut des bonnes sœurs). Là aussi, une majorité sortait dans la rue pour protester. Du jamais vu !

Le mouvement lycéen remporta la victoire !

Le mouvement était large et profond : « non à la réforme de VDB », « à bas VDB » ! Tout ceci sans internet, sans GSM et autres sms, sans planification ou organisation par des courants ou partis politiques. La jeunesse se révoltait. VDB décrivait l’agitation lycéenne comme l’œuvre de certains « agitateurs professionnels » mais cela n’arrêtait pas du tout le mouvement. Tant que la réforme n’était pas retirée, on continua les manifestations et protestations de toute sorte. Et le mouvement lycéen remporta la victoire !

Cette victoire sera la base d’un renouveau dans les actions contre l’OTAN et plus tard dans les mobilisations massives contre le placement de missiles nucléaires en Belgique (ils y sont toujours, à Kleine Brogel dans le Limbourg…). C’était une autre époque. La guerre froide jouait et VDB négociera plus tard, en 1975, avec le groupe français Dassault pour l’achat de nouveaux avions de combat, d’un coût de 30 milliards de francs.

Les insinuations de la presse de droite qualifiant le mouvement de complot d’agitateurs, n’avaient pas d’impact. Le mouvement était spontané, massif et inflexible dans sa demande de retrait de la mesure.

Aujourd’hui, un mouvement impressionnant pour le climat

En ceci, le mouvement actuel des lycéen.ne.s est très différent. « Agir vraiment contre le réchauffement climatique » est une demande complexe qui ne se traduit pas simplement dans des revendications immédiates et concrètes. C’est aussi en cela que le mouvement est tellement impressionnant : contre le sentiment d’impuissance face au réchauffement climatique, nous assistons à des actions directes dans la rue, partout dans le monde. Et ces actions (brosser des cours, quel « scandale »…) ont déjà leur effet. La ministre flamande de l’Écologie et de l’Agriculture a dû démissionner. Elle avait imprudemment parlé d’un « complot » de la part du mouvement contre sa personne.

Il faudra maintenant que l’aile radicale de la lutte contre le réchauffement climatique se construise et se renforce, contre toutes les récupérations possibles de la part des lobbyistes du capitalisme vert, des universitaires et des politiciens. Les émissions de gaz à effet de serre doivent être réduites rapidement. Il faut élaborer un plan climat qui soit socialement équitable, efficace et qui aide les pays du Sud (qui émettent le moins) vraiment avec le Fonds d’aide promis à Paris.

La perspective d’une grève mondiale pour le climat, couplée à un appel au mouvement ouvrier pour y participer, doit être le point de ralliement et un signe d’espoir. Pour le dire avec un slogan populaire des années ’60 et ’70 : « Ce n’est qu’un début, continuons le combat ! ».

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